Jean Arthuis, président de la commission des finances du Sénat. |
Dans chaque assemblée, il existe une commission des finances composée de parlementaires et plus particulièrement chargée de l’examen du budget. Si leur rôle est strictement encadré par la Constitution, chacune conserve toutefois une influence significative sur la discussion budgétaire. Les commissions des finances examinent le projet de loi de finances avant sa discussion et son vote par le Parlement. A cet effet, elles entretiennent des liens privilégiés avec le gouvernement et assurent l’information du reste du Parlement via leurs échanges avec les autres commissions.
1/ En matière budgétaire, le rôle du Parlement est encadré par deux dispositions de la Constitution :
- art. 40 C : le droit d’amendement des parlementaires est limité par le principe d’irrecevabilité financière selon lequel ils ne peuvent ni diminuer les ressources publiques, ni créer ou aggraver une charge publique (“les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique”) ;
- art. 42 C : sous la Ve République, la discussion porte sur le texte présenté par le Gouvernement (“la discussion en séance des projets de lois de finances et des projets de loi de financement de la sécurité sociale porte en première lecture sur le texte présenté par le Gouvernement”). Sous la IIIe et la IVe République, les commissions des finances étaient plus puissantes car elles détenaient un pouvoir de modification du PLF. Si la révision constitutionnelle de 2008 a bien élargi les pouvoirs du Parlement en ce qui concerne les lois ordinaires, celles-ci étant examinées, en séance publique, sur la base du texte établi par la commission qui en est chargée et non plus sur le texte du Gouvernement, en ce qui concerne les lois de finances, la révision de 2008 n’a rien changé à la procédure puisque c’est le texte du gouvernement qui reste la base de la discussion.
Malgré tout, les commissions des finances de chaque assemblée continuent de jouer un rôle primordial dans l’examen, l’analyse et la discussion du budget :
- art. 43 C : “les projets et propositions de loi sont envoyés pour examen à l’une des commissions permanentes dont le nombre est limité à huit dans chaque assemblée” ;
- art. 39 LOLF : le PLF “est immédiatement renvoyé à l’examen de la commission chargée des finances”.
2/ Chaque commission est composée d’un président, d’un rapporteur général et de plusieurs rapporteurs spéciaux.
Jérôme Cahuzac, président de lacommission des finances de l’Assemblée nationale. |
a) Le président de la commission des finances : il dirige les débats, convoque les ministres et les hauts fonctionnaires pour les auditionner et dispose d’une faculté d’interprétation du règlement de son assemblée afin de régler les éventuels problèmes de procédure. En principe, seul le président de la chambre est compétent en ce domaine, mais il s’en remet traditionnellement aux recommandations du président de la commission des finances qui sont souvent suivies.
b) Le rapporteur général : il a trois missions principales :
- il élabore un rapport général sur le PLF qui offre une analyse globale du budget. Ce rapport se divise en trois tomes : les deux premiers constituent une étude technique détaillée de la première et de la deuxième partie du PLF ; le troisième réalise un exercice de politique critique où l’on retrouve son analyse personnelle du budget ;
- il coordonne les travaux des rapporteurs spéciaux, présente ses conclusions à la commission des finances et dépose des amendements au nom de la commission lors de la séance publique ;
- il joue un rôle de conseil auprès de ses collègues (dans la rédaction d’un amendement) et de force d’interposition entre les parlementaires et le gouvernement avec lequel il peut négocier certaines modifications du budget.
c) Les rapporteurs spéciaux : désignés au sein de chaque commission des finances, ils sont chargés d’étudier de manière détaillée les budgets des différentes missions, budgets annexes et comptes spéciaux du Trésor, ainsi que de rendre un rapport sur ces différents sujets au nom de la commission. Ils ont un rôle de médiation important. D’une part, vis-à-vis des autres parlementaires, puisqu’ils peuvent être convoqués devant les autres commissions dont les compétences correspondent aux budgets qu’ils examinent. D’autre part, vis-à-vis des Ministères dont ils ont la charge, car ils nouent avec eux un véritable dialogue :
- ils prennent connaissance durant le second trimestre (bien avant le dépôt du PLF) du Rapport sur les comptes de la nation qui fait le bilan économique de l’année écoulée et prévoit les grandes tendances de l’année en cours ;
- ils sont tenus informés des évaluations des organismes de prévision ;
- ils adressent des questionnaires au Gouvernement qui doit répondre dans un délai déterminé (art. 49 LOLF : “en vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année, (…) les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et les autres commissions concernées adressent des questionnaires au Gouvernement avant le 10 juillet de chaque année. Celui-ci y répond par écrit au plus tard le 10 octobre”) ;
- ainsi que le président de la commission et les rapporteurs généraux, ils peuvent procéder à toutes investigations sur pièces et sur place et à toutes les auditions qu’ils jugent utiles (l’art. 57 LOLF ajoute que “tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical, doivent leur être fournis. Les personnes dont l’audition est jugée nécessaire par le président et le rapporteur général de la commission chargée des finances de chaque assemblée ont l’obligation de s’y soumettre. Elles sont déliées du secret professionnel sous les réserves prévues à l’alinéa précédent”).
Le tableau suivant détaille la composition de chaque commission des finances :
Commission des finances | Assemblée nationale | Sénat |
Nombre de parlementaires | 74 députés | 48 sénateurs |
Président | Jérôme Cahuzac (il remplace Didier Migaud depuis février 2010) | Jean Arthuis |
Rapporteur général | Gilles Carrez | Philippe Marini |
3/ En plus des commissions des finances, les autres commissions (six au Sénat ou sept à l’Assemblée nationale) sont saisies de la partie du PLF qui entre dans leur domaine de compétence. Elles ont aussi la possibilité d’adresser des questionnaires au Gouvernement qui doit répondre selon les mêmes contraintes de temps. Elles sont tenues informées des travaux de la commission des finances par des échanges. Le règlement de l’Assemblée nationale permet aux commissions de désigner certains de leurs membres pour participer à la commission des finances lorsqu’elle examine les crédits relevant de leurs compétences. Des rapporteurs pour avis sont désignés dans ces commissions afin d’étudier le projet de budget sous l’angle sectoriel qui les concerne.