La croissance économique

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La croissance économique désigne l’augmentation du produit intérieur brut (PIB), généralement sur une période d’un an. Elle est un indice de l’augmentation des richesses. Pour la mesurer, on recourt au taux de croissance qui est le taux de variation du PIB d’une année à l’autre. Si elle est un outil économique majeur permettant de mesurer la puissance économique d’un pays, elle reste toutefois sujette à critiques, notamment parce qu’en restant focalisée sur les seules activités productives, elle ne prend pas en compte leurs impacts sur l’environnement (qui ont un coût) ou la redistribution des richesses en matière d’éducation ou de santé de la population. 


1/ Le taux de croissance économique se concentre sur les variations du PIB, ce qui permet de déterminer dans quelle phase se trouve une économie. 

A/ La croissance est évaluée par rapport au taux de variation du Produit intérieur brut (PIB). Lorsqu’on parle de croissance économique, on désigne en réalité ce taux de variation. Il s’exprime en pourcentage. Pour constater un écart d’une année sur l’autre, on l’exprime en point. Par exemple, si le taux de croissance pour la France est de 1,4% en 2010 et de 1,6% en 2011, alors le taux de croissance a augmenté de à 0,2 points de 2010 à 2011. 
L’activité économique évolue de manière cyclique en alternant deux phases : 

  • l’expansion : c’est une augmentation du taux de croissance ; 
  • la récession : c’est une diminution du taux de croissance, il y a de la croissance, mais moins que l’année précédente. 

Les points critiques auxquels interviennent ces changements sont : 

  • la crise : passage d’une phase d’expansion à une phase de récession ; 
  • la reprise : passage d’une phase de récession à une phase d’expansion. 
Graph. 1. La dimension cyclique de l’économie. 

Lorsque le PIB diminue au sein d’une économie, on parle non pas de récession mais d’un taux de croissance négatif. Cela signifie qu’il y a destruction de richesse, alors que la récession désigne une activité économique qui progresse toujours, mais de manière moins soutenue que la période précédente. 
Le graphique ci-dessous fait apparaître plusieurs phases dans l’évolution du taux de croissance français (les données pour 2012 et 2013 sont des estimations). 

Graph. 2. Evolution du taux de croissance français de 2006 à 2013.
Source : OCDE.

Ainsi, la France a connu une crise en 2007 avec une phase récessive qui a conduit à un taux de croissance négatif en 2008 et en 2009. Cependant, la reprise s’est amorcée en 2009 conduisant à des taux de croissance positif de 1,4% en 2010 puis de 1,6% en 2011. Selon les prévisions de l’OCDE, il y aurait néanmoins un retour de la récession en 2012 (0,3% de croissance seulement). 
Le tableau ci-dessous donne les taux de croissance de 2006 à 2011, ainsi que des estimations pour les années 2012 à 2013 des principales économies mondiales. 

Tableau des taux de croissance de 2006 à 2013. 
Source : OCDE. 

D’un point de vue mondial, la lecture du tableau ci-dessus, permet de constater l’impact de la crise des subprimes sensible en 2009 où la plupart des pays connaissent alors un taux de croissance négatif, la Chine mise à part. L’année 2010 voit la situation nettement s’améliorer. Le seul pays du tableau qui connaît encore en 2011, un taux de croissance négatif est le Japon (-0,3%). Il faut voir là une conséquence du tsunami et de l’accident de Fukushima. 
Néanmoins, si l’on constate une reprise de l’économie européenne, les perspectives restent assez peu optimistes puisque les prévisions pour 2012 et 2013 de l’OCDE sont autour de 1,5% pour la zone euro avec une récession prévue pour 2012. Aux Etats-Unis, en revanche, la reprise semble confirmée avec une phase d’expansion prévue de 2% de croissance en 2012 et 2,5% en 2013. 

B/ Sur le long terme, il peut être intéressant de calculer le taux de croissance annuel moyen (TCAM). Ce calcul permet de déterminer une tendance (en anglais : trend) de la croissance pour une période donnée. Il donne alors une moyenne de l’augmentation du PIB sur cette période. Il est utile notamment pour caractériser la croissance. Par exemple, dans les années des Trente Glorieuses (1945-1975), il est possible de constater un TCAM plus élevé que celui des années qui suivent. Ce fort taux est caractéristique des économies de rattrapage, la France devant se reconstruire et reconstituer son retard sur les Etats-Unis.
La formule pour calculer le TCAM est la suivante : 

VA : valeur d’arrivée (PIB de la dernière année prise en compte) VD : valeur de départ (PIB de la première année) n : nombre d’années 
Le tableau ci-dessous donne les taux de croissance annuels moyen en France. 

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Tableau des Taux de croissance annuels moyen (TCAM) de la France.
Source : Chamblay, Montoussé, Renouard, 2010.

Ainsi, de 1960 à 1973, le PIB réel en France a progressé en moyenne de 5,6% chaque année. Il est possible alors de remarquer que les Trente Glorieuses s’étendent sur une période beaucoup plus réduite que la période de 30 ans qui lui est traditionnellement associée. On peut également souligner que la croissance française connaît une baisse de son trend par rapport à cette époque passant à 2% pour les années 2000. Il s’agit moins d’un phénomène de crise que d’un retour à la normale suite aux niveaux atteints pendant les Trente glorieuses. Il reste que la crise des subprimes se traduira probablement par une diminution du trend de croissance, à moins que la reprise soit aussi dynamique que la crise. Les prévisions de l’OCDE laissent toutefois sceptique sur cette possibilité. 

C/ L’un des objectifs de la politique économique est de parvenir à rapprocher le PIB observé de son niveau tendanciel, c’est-à-dire à le rapprocher du trend de croissance. Lorsqu’il concerne une prévision sur l’avenir, ce trend de croissance est appelé taux de croissance potentielle. La croissance potentielle est une estimation statistique réalisée à partir de données sur les facteurs de production qui sont essentiellement le capital et le travail. 
En raison des cycles économiques, sur le court terme, il existe toujours une différence entre la croissance potentielle et la croissance effectivement réalisée. Cet écart de production est également appelé le décalage conjoncturel (en anglais : output gap). Mais sur le moyen et long terme, la croissance est en moyenne égale à la croissance potentielle. En France, le taux de croissance potentiel pour la période 2008–2015 est de 2,1% (pour plus de détails sur la méthode d’estimation, consulter : “Révisions de la croissance potentielle de l’économie française à moyen-long terme”, 2006 sur le site du ministère de l’économie).
Pour rapprocher le taux de croissance réel du taux de croissance potentiel, plusieurs possibilités s’ouvrent aux décideurs publics : 

  • à court terme : le taux d’investissement et le taux d’emploi. Plus d’investissements et une durée d’utilisation plus longue des moyens de production permettent en effet d’augmenter la production ; 
  • à long terme : les évolutions technologiques permettent d’améliorer la production. 

2/ Si la mesure du PIB signifie qu’un pays s’enrichit, elle présente un certain nombre de limites concernant les dimensions sociales et environnementales de cet enrichissement. 

A/ Outre le fait que la mesure du PIB ne suffit pas à dire si la population profite effectivement de l’augmentation des richesses (par exemple : si la population augmente ou si la répartition est telle qu’une partie n’en bénéficie pas, d’où l’intérêt de mesurer le PIB par tête), celle-ci ne prend pas en compte la production relevant de l’économie informelle. L’économie informelle, qui s’oppose à l’économie officielle, celle prise en compte par la comptabilité nationale, comporte en réalité trois dimensions : 

  • l’économie domestique : ce sont les biens et services produits par les ménages tels que la cuisine, le bricolage, le jardinage, les gardes d’enfant, etc. ; 
  • l’économie conviviale : ce sont les biens et services rendus bénévolement par les associations ; 
  • l’économie souterraine : ce sont les biens et services licites mais non déclarés comme le travail au noir ou encore les biens et services illicites tels que les vols ou le trafic de drogue. 

Il faut ajouter que le PIB comprend la consommation de capital fixe (CCF), c’est-à-dire l’amortissement économique nécessaire au remplacement du capital fixe. Or l’amortissement ne constitue pas un indice de richesse à proprement parler. C’est simplement une somme mise de côté par l’entreprise pour assurer le renouvellement de son capital productif. 

B/ Dans les années d’abondance des Trente glorieuses, la croissance est analysée positivement comme le meilleur stimulant de l’économie d’un pays. Mais à la fin des années 60, les économistes du MIT (Massachusset Institute of Technology) vont attirer l’attention des pouvoirs publics sur les risques liés à un rythme de croissance trop effréné. Réunis au sein du Club de Rome, ces économistes vont publier, sous la direction de Dennis Meadows, un rapport intitulé Halte à la croissance (1972), qui va mettre en avant le danger d’épuisement des ressources naturelles que fait planer le développement à outrance de la société de consommation. 
Plusieurs rapports du Club de Rome suivent ce premier rapport. Dans l’ensemble, ils contribuent à instaurer l’idée d’un développement durable plus soucieux de l’environnement. Cette prise de conscience a été renforcée par les nombreux naufrages conduisant à des marées noires désastreuses (Amoco Cadiz en 1978 au large de la Bretagne) et à des catastrophes nucléaires (Tchernobyl en 1986). 
En 1987, Gro Harlem Bruntland, président de la commission des Nations unies sur l’environnement humain, rend public un rapport qui propose une définition du développement durable (en anglais : sustainable development) : « le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Ce rapport Bruntland (1987) met ainsi au centre des préoccupations l’écologie ainsi que la solidarité intergénérationnelle. Il sert ensuite de base à la conférence de Rio de 1992 (aussi appelée le Sommet de la Terre) réunissant les dirigeants de la planète sous l’égide de l’ONU pour qu’ils prennent conscience des enjeux climatiques liés à l’activité productive. 
Lors de cette conférence, un nouvel indicateur est mis en avant par l’économiste William Rees : l’empreinte écologique (en anglais : ecological footprint). Cet indice convertit les modes de vie en surfaces consommées. Il permet de montrer que l’humanité dépasse les capacités de régénération de la planète depuis le milieu des années 1980 et que si chaque homme vivait comme un Américain, quatre planètes ne suffiraient pas. Selon le rapport Planète vivante (2010) par l’organisation WWF (en anglais : World Wide Found, ce qui signifie Fond mondial pour la Nature, elle a beaucoup contribué à populariser cet indice), l’humanité utilise l’équivalent d’une planète et demie pour subvenir à ses besoins, principalement en raison de la surconsommation des pays les plus riches. 

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C/ In fine, il apparaît important de distinguer la croissance économique du développement. Le développement est un phénomène plus qualitatif qui prend en compte non seulement les données environnementales favorables à la croissance, mais aussi sa dimension sociale. Trois principaux indicateurs sont particulièrement à signaler dans ce domaine. 

a/ L’Indice de développement humain (IDH) a été mis au point en 1990 par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) sous l’inspiration du prix Nobel de l’économie 1998 : Amartya Sen. En agrégeant au PIB par habitant des données sur la santé et l’éducation, il permet d’apprécier l’amélioration de la qualité de vie. Il prend en compte trois données : 

  • la santé (mesurée par l’espérance de vie à la naissance), 
  • le niveau d’éducation (mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes, le taux de scolarisation), 
  • le niveau de vie (mesuré par le PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat – la croissance du revenu étant pondérée par l’augmentation du prix d’un panier de biens). 

Comparé au PIB, l’IDH met en avant de nombreuses différences entre les pays : les Etats-Unis, premier pays pour le PIB n’arrive qu’en 4e position. Le pays où l’IDH est le plus élevé en 2011 est la Norvège, suivi de l’Australie et des Pays-Bas. La France arrive loin derrière, en 20e position (pour en savoir plus sur l’IDH : site du PNUD). 

IDH en 2011. Source : PNUD.

b/ Le Baromètre des inégalités et de la pauvreté (BIP 40) imite ironiquement l’indice boursier du CAC 40 qui réunit la cotation des quarante meilleures entreprises françaises sur les marchés boursiers. Il mesure le nombre de pauvres en France par l’agrégation de données sur le travail, le revenu, le logement, l’éducation, la santé et la justice. Il a été créé en 2002 par une équipe de militants syndicalistes, économistes et statisticiens. 

Graph. 3. BIP 40 depuis 1980.
Source : site sur le BIP 40.

Si la méthode de calcul se trouve contestée par l’INSEE (notamment la méthode de construction du baromètre qui agrège et pondère une série d’indicateurs en manquant de rigueur – à titre d’exemple, le recalcul de l’indice sans tenir compte de la dimension “justice” permet de conclure que les inégalités et la pauvreté ont légèrement reculé depuis 1990), elle ouvre le débat sur la mesure de la pauvreté qui n’est actuellement pas prise en compte, ce qu’un principe de symétrie appliqué au PIB rendrait nécessaire (on mesure la richesse donc aussi la pauvreté). Selon la mesure du BIP 40, la pauvreté se serait accrue en France de 1980 à 2004. 

c/ Enfin, l’Indice de Santé Sociale (ISS) aux Etats-Unis se calcule à partir de l’agrégation de 16 données dont les délits violents, l’accès au logement ou les inégalités de revenu. Publié en 1996, l’ISS a engendré une vive polémique. En le comparant au PIB, on constate en effet un net décrochage entre la progression de la richesse et celle du bien-être social aux Etats-Unis, ce dernier étant en baisse constante depuis 1969 alors que le PIB continue de s’accroître.