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Le contrôle budgétaire des budgets locaux permet de corriger les principaux dysfonctionnements pouvant survenir au cours du processus budgétaire. La décentralisation ayant supprimé la tutelle financière de l’Etat sur les collectivités territoriales, le préfet ne s’assure plus désormais directement de la conformité des budgets à la réglementation, mais conserve un pouvoir d’initiative dans leur contrôle. Les Chambres régionales des comptes (CRC) détiennent un pouvoir de proposition essentiel, notamment du fait de leur expertise.
1/ Le représentant de l’Etat veille au respect des procédures budgétaires par les collectivités territoriales. Il travaille en collaboration étroite avec la CRC. En pratique, les préfets s’écartent peu des préconisations des CRC.
a) Le projet de budget est préparé par l’exécutif local, l’adjoint ou le vice-président chargé des finances et les services financiers de la collectivité. Il est ensuite examiné par la commission des finances, puis soumis à l’assemblée délibérante. L’examen du budget doit être précédé d’un débat d’orientation budgétaire (DOB) deux mois avant (sauf pour les communes de moins de 3 500 habitants où le DOB n’est pas obligatoire). Le vote se fait souvent par chapitre (regroupant les dépenses par nature) et plus rarement par fonction (procédure plus complexe, possible seulement dans les communes de plus de 10 000 habitants, dans les départements et dans les régions).
L’adoption du budget primitif doit avoir lieu au plus tard le 31 mars de l’année à laquelle il s’applique. Le budget voté est ensuite transmis au préfet pour qu’il effectue son contrôle de légalité et son contrôle budgétaire. Il est enfin rendu public. Toutes ces formalités sont nécessaires pour que le budget soit exécutoire.
b) Le préfet dispose d’un pouvoir d’initiative pour engager des procédures de contrôle budgétaire dans deux situations :
- si le budget primitif n’est pas adopté dans le délai légal (108 saisines en 2009) ;
- s’il n’est pas voté en équilibre sincère et réel (116 saisines en 2009).
En cas de dépassement des délais d’adoption du budget primitif ou si le budget n’est pas transmis dans un délai de 15 jours, le préfet doit saisir la CRC. La saisine prive l’assemblée locale de son pouvoir de délibération sur le budget. La procédure est la suivante :
- la CRC examine la recevabilité du recours du préfet et formule ses propositions pour le règlement du budget (elle propose en général un budget minimal pour permettre d’assurer la continuité des services publics). Elle dispose pour cela d’un délai d’un mois ;
- le préfet dispose ensuite de 20 jours pour prendre un arrêté de règlement d’office du budget (il peut s’éloigner des préconisations du juge, mais alors il devra motiver ses décisions) et fixer le montant des recettes et des dépenses de la collectivité. Ses décisions peuvent voir leur légalité contestée devant un tribunal administratif. L’arrêté a l’effet d’une délibération budgétaire.
Lorsque le budget est voté en déséquilibre ou si les dépenses obligatoires ne sont pas inscrites au budget, le préfet procède au règlement partiel du budget :
- le préfet a 30 jours pour saisir la CRC s’il estime que la justification du double équilibre du budget local (global et par section) n’est pas suffisamment convaincante ;
- si la CRC constate le déséquilibre, elle propose à la collectivité de prendre les mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre (majoration de recettes ou réduction de dépenses) par le biais d’une nouvelle délibération (elle dispose d’un délai d’un mois pour faire ses propositions qui peuvent aller jusqu’à un plan pluriannuel de redressement de la situation financière) ;
- la collectivité dispose ensuite d’un mois pour suivre ou non les propositions de la CRC. Mais si les mesures adoptées ne satisfont pas la CRC, celle-ci motive un avis adressé à la collectivité et au préfet. Ce dernier prend alors un arrêté de règlement d’office du budget.
2/ En cas de non inscription d’une dépense obligatoire ou en cas d’inscription pour un montant insuffisant (180 saisines en 2009), la CRC peut être saisie par le comptable public, le préfet ou toute autre personne ayant un intérêt à agir suffisant (un créancier par exemple).
a) La CRC va d’abord se prononcer sur la nature de la dépense (obligatoire ou non). Sa décision peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif.
Si la dépense est qualifiée d’obligatoire, la CRC met en demeure la collectivité d’inscrire la dépense à son budget.
Si la décision n’est pas suivie d’effet dans un délai d’un mois par l’adoption d’une décision budgétaire modificative, la CRC demande au préfet d’inscrire d’office la dépense au budget et propose éventuellement la création de ressources ou la diminution de dépenses non obligatoires. La CRC ne formule qu’une proposition et ne prend pas de décision.
Le préfet dispose ensuite de 20 jours pour régler le budget. Il peut refuser de suivre les indications de la CRC par le biais d’une décision motivée en requalifiant la dépense, son montant ou son mode de financement. Cette décision peut alors être contestée devant le juge administratif et éventuellement engager la responsabilité de l’Etat pour faute lourde.
Enfin, il faut que l’exécutif local procède à l’ordonnancement de la dépense considérée comme obligatoire. Il dispose d’un délai d’un mois pour le faire.
b) Si l’exécutif local n’a pas procédé à l’ordonnancement au-delà de ce délai d’un mois, une nouvelle procédure se met en place qui ne fait intervenir que le préfet. Le préfet procède alors d’office au mandatement et demande au comptable de la collectivité de procéder au paiement.
c) Pour les dépenses clairement chiffrées et rendues obligatoires par une décision de justice ayant acquis force de chose jugée, le préfet peut prélever directement les sommes sur le budget local. Cette procédure permet d’obliger une collectivité publique à s’acquitter de ses dettes, étant donné qu’il n’existe pas de possibilité de recourir aux voies d’exécution contre les personnes morales de droit public.
En conclusion, les CRC ne disposent d’aucun pouvoir de substitution financière. Elles jouent seulement un rôle d’alerte des autorités compétentes (collectivités et préfets) lorsqu’elles sont saisies d’irrégularités présentes dans les budgets locaux. Si l’ordonnateur de la collectivité refuse de faire droit à la mise en demeure, le préfet peut y procéder d’office par arrêté. Mais in fine, c’est le tribunal administratif qui reste le juge de la légalité des décisions budgétaires.