Les opérations d’exécution des dépenses et des recettes

Les opérations d’exécution comportent une phase administrative qui incombe à l’ordonnateur et une phase comptable qui revient évidemment au comptable. L’exécution des dépenses renvoie à la procédure permettant de dépenser l’argent public. Elle est caractérisée par une procédure lourde qui connaît pour cette raison une alternative simplifiée en cas d’urgence. Quant à l’exécution des recettes, elle se fait selon une procédure qui varie selon la nature des ressources perçues (impôts directs ou indirects, autres ressources, etc.).

1/ L’exécution des dépenses se fait selon une procédure complexe, qu’on appelle le circuit de la dépense, et qui nécessite de distinguer deux phases et quatre étapes : 

  • la phase administrative (art. 28 RGCP) : avant d’être payées, les dépenses sont engagées, liquidées et, le cas échéant, ordonnancées : 
    • l’engagement (art. 29 RGCP) : c’est l’acte par lequel un organisme public constate à son encontre une obligation d’où résulte une charge. Autrement dit, c’est le fait générateur de la dépense. Il se traduit par l’affectation des crédits nécessaires au règlement de la dépense. Seul l’ordonnateur chargé du chapitre budgétaire d’imputation de la dépense a qualité pour procéder à l’engagement. Pour les dépenses présentant un enjeu budgétaire majeur, l’ordonnateur principal ne peut engager la dépense qu’après avis préalable du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM – il en existe à peu près une quinzaine, ils sont rattachés au ministère du Budget et placés auprès des ministres pour assurer le contrôle financier) ; 
    • la liquidation (art. 30 RGCP) : elle a pour objet de vérifier la réalité de la dette et d’arrêter le montant de la dépense. L’ordonnateur doit s’assurer d’une part, que le service a été fait (commande livrée, travaux réalisés), et d’autre part, qu’il dispose des pièces justificatives attestant la réalisation de la prestation. Il fixe ensuite le montant ; 
    • l’ordonnancement (art. 31 RGCP) : c’est l’acte administratif donnant l’ordre de payer la dette. Cet ordre est donné au comptable et se traduit soit par une ordonnance de paiement (pour l’ordonnateur principal), soit par un mandat de paiement (pour l’ordonnateur secondaire). Avant d’être adressée au comptable, l’ordonnance doit être préalablement revêtue du visa du CBCM, même si certaines dépenses peuvent être payées sans ordonnancement préalable, notamment pour des raisons de rapidité (exemple : le paiement des traitements des fonctionnaires). Il faut ajouter que tout créancier de l’Etat peut former un REP contre la décision de refus d’ordonnancement quel que soit le motif (défaut de crédit, irrégularité comptable, etc.) ;
  • la phase comptable : elle est unique, il s’agit du paiement (art. 33 RGCP) : c’est l’acte par lequel l’organisme public se libère de sa dette. Avant de payer, le comptable a toutefois deux choses à faire : 
    • procéder d’abord aux vérifications de régularité prévues à l’art. 12 RGCP, à savoir : la qualité de l’ordonnateur, la disponibilité des crédits, l’exacte imputation de la dépense et la validité de la créance (justification du service fait, exactitude du calcul de la liquidation, existence du visa du CBCM) ;
    • viser l’ordonnance ou le mandat en s’assurant du caractère libératoire du paiement, c’est-à-dire que le paiement est bien effectué au profit du véritable créancier et qu’il n’existe pas d’obstacles juridiques au règlement. 

En cas d’urgence, l’exécution des dépenses peut se faire selon des procédures simplifiées

  • la régie d’avances (art. 18 RGCP) : un comptable public peut charger un agent public (le régisseur) de recevoir les avances de sommes nécessaires au paiement de dépenses limitées dans leur montant et dans leur durée (les dépenses de petites fournitures de bureau par exemple) ; 
  • le paiement sans ordonnancement préalable (art. 31 RGCP) : pour les dépenses urgentes ou répétitives, l’ordonnancement peut soit intervenir après paiement, soit disparaître totalement (pour les dépenses dont le principe, le montant et l’échéance sont fixés par la loi, telles que les dépenses de la dette publique par exemple). 

La prescription quadriennale des dettes de l’Etat : pour éviter l’accumulation des dettes non payées, les droits des créanciers de l’Etat sont prescrits au bout d’un délai de 4 ans (loi de 1968). Le point de départ de ce délai commence au 1er janvier de l’année qui suit. Cette prescription peut toutefois être interrompue ou suspendue. Par décision conjointe de l’ordonnateur principal et du ministre des Finances, le créancier peut être relevé de la prescription en raison de circonstances particulières. 
Il faut noter que la LOLF met en place une comptabilité patrimoniale. L’art. 30 LOLF dispose :

“La comptabilité générale de l’État est fondée sur le principe de la constatation des droits et obligations. Les opérations sont prises en compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent, indépendamment de leur date de paiement ou d’encaissement.”

Cette comptabilité s’inspire des règles de la comptabilité privée : les ressources et les charges de l’Etat sont enregistrées selon le principe de la constatation des droits et rattachées à l’exercice, et non plus, comme c’était le cas auparavant, en fonction des dates. Cela constitue un véritable progrès dans l’exécution de la dépense.




2/ L’exécution des recettes pour ce qui concerne les impôts directs, nécessite également de distinguer deux phases et quatre étapes : 

  • la phase administrative : elle comprend trois étapes successives qui sont la constatation des droits, la liquidation et l’émission d’un ordre de recette : 
    • la constatation des droits : l’ordonnateur détermine l’assiette de l’impôt, c’est-à-dire les personnes qui entrent dans son champ d’application (qui paie ?) et la matière soumise à prélèvement autoritaire (à partir de quoi ?) ; 
    • la liquidation : c’est le calcul du montant de la dette des redevables qui peut être fait soit par les contribuables (TVA), soit par l’administration (IR et impôts locaux), soit par un tiers (retenue à la source) ; 
    • l’émission de l’ordre de recette : l’ordonnateur émet un titre de perception. Pour les impôts directs, il s’agit d’un rôle nominatif (comportant la liste des contribuables, l’assiette et le montant de l’impôt). Le rôle est rendu exécutoire par arrêté préfectoral. Le préfet peut déléguer ce pouvoir aux services fiscaux. Certains impôts directs ne sont pas perçus par voie de rôle, mais recouvrés directement par les comptables du Trésor (l’IS par exemple). Pour les petites sommes (>30€), l’ordonnateur peut ne pas émettre d’ordre de recette) ; 
  • la phase comptable : ici encore, elle est unique : c’est le recouvrement. Il s’agit du règlement de la dette du débiteur d’une créance publique auprès du comptable public. Le recouvrement peut être amiable (spontané) ou forcé (nécessité de mettre en œuvre des procédures à l’encontre du débiteur, par exemple en passant par l’employeur). En matière fiscale, les comptables qui sont chargés du recouvrement sont les comptables de la Direction générale des finances publiques (DGFIP). Ils sont compétents pour la grande majorité des impôts (IR, IS, TVA, droit d’enregistrement, impôts locaux). 
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En ce qui concerne le recouvrement des impôts indirects, le comptable recouvre directement les recettes, la séparation entre ordonnateur et comptable est quasi inexistante. Les phases préliminaires d’assiette et d’émission de titre de perception n’ont pas lieu d’être, les impôts indirects (TVA, TIPP) étant calculés par le redevable qui paie comptant en même temps qu’il effectue sa déclaration. Ce n’est qu’en cas de litige avec le contribuable qu’un titre de recette exécutoire est adressé au contribuable et que les comptables assurent le recouvrement forcé. 
Le recouvrement des autres recettes

  • les recettes domaniales : elles sont recouvrées par les comptables de la DGFIP, mais les recettes résultant des coupes de bois sont perçues par le comptable de l’Office national des forêts ou par les comptables du Trésor. 
  • les condamnations pécuniaires : elles sont recouvrées selon des procédures particulières précisées dans un décret de 1964 par les comptables directs du Trésor. 

Il existe plusieurs exceptions au recouvrement :

  • l’admission en non-valeur (art. 92 RGCP) : elle est prononcée par l’ordonnateur lorsqu’une recette n’a pas pu être recouvrée par le comptable pour des raisons indépendantes de sa volonté (débiteur insolvable par exemple). Cette recette doit être non fiscale, non domaniale ou ne pas présenter le caractère d’une condamnation pécuniaire ;
  • la faculté de transaction : pour les sommes inférieures à 76 000 €, les comptables peuvent transiger (négocier) eux-mêmes, mais au-delà de cette somme, seul l’Agent judiciaire du Trésor est compétent ;
  • les remises : pour les ordres de recettes du budget général (ou comptes spéciaux et budgets annexes) que le comptable prend en charge, il peut consentir des remises dont le montant pour une même dette ne peut pas excéder 76 000 €. Sa décision peut faire l’objet d’un recours devant le ministre du Budget. Entre 76 000 € et 150 000 €, seul le ministre peut consentir la remise. 

Les créances publiques sont soumises au droit commun de la prescription qui est d’une durée de 30 ans. En matière fiscale cependant, la prescription est plus courte se situant autour de 4 ans et pouvant être portée à 10 ans.