Avec l’Assemblée nationale, le Sénat compose en France ce qu’on appelle le Parlement. La Constitution de la Ve République pérennise le bicaméralisme, c’est-à-dire le fonctionnement du Parlement en deux chambres : l’Assemblée nationale représentant le peuple et le Sénat, les collectivités territoriales. Le système parlementaire repose sur un bicaméralisme inégalitaire puisque le Sénat dispose de prérogatives moins importantes que l’Assemblée nationale. Nous allons avoir tout d’abord comment il fonctionne, puis dans quel but il a été institué
1. Organisation du Sénat
Le Sénat, que l’on appelle aussi la Chambre haute du Parlement français, comprend en 2008, 343 sénateurs élus au suffrage indirect par de grands électeurs qui siègent à Paris au Palais du Luxembourg. Avant 2003, les sénateurs étaient élus pour neuf ans, ils le sont maintenant pour six ans. L’âge minimum pour être sénateur est 30 ans. Les élections sont organisées tous les trois ans pour chaque moitié de sièges, ce qui permet de modérer les revirements de l’opinion et constitue un facteur de stabilité. Les grands électeurs sont au nombre de 150 000 comprenant une grande majorité de délégués des conseils municipaux (le nombre de délégués variant selon la taille des communes), mais aussi les conseillers généraux, les conseillers régionaux et les députés de l’Assemblée nationale.
Le président du Sénat est élu tous les trois ans, il s’agit depuis 2008 de Gérard Larcher (UMP). Il dispose de pouvoirs propres comme de nommer trois membres au Conseil constitutionnel (qui est composé de neuf membres nommés par tiers par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat), l’une des trois personnalités qualifiées au Conseil supérieur de la magistrature, mais aussi des membres d’autres autorités de régulation : deux des membres de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’une des trois personnalités qualifiées de l’Autorité des marchés financiers et trois des membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel. En outre, il est consulté par le président de la République avant la dissolution de l’Assemblée nationale (article 12) et sur la mise en œuvre de l’article 16 (pouvoirs exceptionnels du président de la République). Enfin, le président du Sénat assure l’intérim du chef de l’Etat.
Le Sénat tout comme l’Assemblée nationale dispose de commissions législatives. Il existe six commissions permanentes au Sénat (article 43 de la Constitution de 1958), constituées à la représentation proportionnelle des groupes parlementaires. Les commissions examinent les textes législatifs au fond (lorsque la commission est concernée par le texte) ou pour avis (lorsqu’elle n’est concernée qu’à la marge). Ces commissions sont les suivantes : Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées ; Affaires sociales ; Culture, Éducation et Communication ; Economie, Développement durable et Aménagement du territoire ; Finances ; Lois constitutionnelles, Législation, Suffrage universel, Règlement et Administration générale.
Les sénateurs se différencient par leur appartenance politique. Ce regroupement date de 1789 et de la transformation des états généraux en Assemblée constituante qui regroupe les députés non plus selon les ordres (Clergé, Noblesse, Tiers états), mais selon leur engagement politique (à droite les tenants du droit de veto royal, à gauche les adversaires). Au Sénat, le seuil de constitution d’un groupe parlementaire est de 15 membres.
Le travail des sénateurs se fait à l’intérieur des sessions, c’est-à-dire des périodes pendant lesquels les sénateurs siègent. Il faut distinguer la session ordinaire, les sessions de plein droit et les sessions extraordinaires. La session ordinaire commence le premier jour ouvrable du mois d’octobre et prend fin le dernier jour ouvrable de juin. Le Sénat fixe librement ses semaines, jours et heures de séance. Les sessions de plein de droit ont lieu lors de l’application de l’article 16, à la suite d’une dissolution (article 12) ou lors d’un message du président de la République au Congrès. Enfin les sessions extraordinaires s’ouvrent à la demande du Premier ministre ou à la majorité des députés, sur un ordre du jour déterminé par le décret d’ouverture signé du président de la République et prend fin dès que l’ordre du jour est épuisé. Ces limitations sont une manière de limiter l’ultra parlementarisme de la IIIe et IVe République, générateur d’instabilité gouvernementale.
2. Fonctions du Sénat
Selon Léon Gambetta (1838-1882), président du Conseil des ministres sous la IIIe République, la vocation du Sénat est d’être le « grand conseil des communes de France ». Le maintien du Sénat en 1958 répond à cette idée d’assurer la représentation des collectivités territoriales au niveau national : « le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République » (article 24). Longtemps purement symbolique, cette représentation qui ne se fonde sur aucune considération objective (il n’existe pas en France un fédéralisme comme en Allemagne ou aux Etats-Unis), est depuis 2003 assortie d’une priorité dans l’examen des textes concernent les collectivités territoriales (article 39).
Le Sénat dispose de moindres prérogatives que celles de l’Assemblée nationale. A l’issu des navettes parlementaires, il ne peut pas imposer son point de vue en dernier ressort, à l’exception des lois organiques et projets de révision constitutionnelle sur lesquels il dispose d’un droit de veto. De surcroît, il examine en second les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale. Enfin, il n’a pas le pouvoir de renverser le gouvernement (article 49) . Dans la pratique, selon le constitutionaliste Marcel Prélot (1898-1972), il vaut mieux parler de « bicaméralisme incomplet ».
Le sénat a néanmoins deux fonctions principales : il vote la loi et il contrôle le gouvernement. Le Sénat a en effet une fonction législative : les sénateurs peuvent déposer une proposition de loi auprès du bureau du Sénat, mais surtout ils discutent et votent les projets de loi présentés par le gouvernement ou les propositions de loi présentées par un ou plusieurs parlementaires. Chaque loi est examinée par une commission qui nomme un rapporteur. Ce rapporteur évalue la loi, propose d’éventuels amendements. Au cours de la séance publique, il défend les amendements adoptés par la commission. Chaque sénateur dispose alors d’un droit d’amendement, et à l’issue de la discussion, le texte est soit adopté, soit rejeté.
Le contrôle est, à côté du vote de la loi, la deuxième grande fonction du Sénat. Ce contrôle s’exerce sur le gouvernement en séance publique et, de façon permanente, par le travail des commissions et délégations du Sénat. Les actions de contrôle prennent la forme de questions, rapports, débats, et couvrent l’ensemble des champs de l’activité publique. Naguère axé sur l’activité gouvernementale proprement dite, le contrôle tend à prendre plus de champ, pour s’intéresser à l’efficacité des politiques publiques dans leur ensemble (et non pas simplement l’action du Gouvernement dans tel ou tel domaine), ce qui peut amener les assemblées à s’interroger sur les dispositifs législatifs qu’elles ont elles-mêmes adoptés : au contrôle classique s’ajoute désormais un effort d’évaluation.
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